Poème du jour...
Chaque jour, au self, vous pouvez aussi choisir un poème à déguster....
(sélection Melle Rivals)
Vendredi 19 avril
Je rêve toujours
Et dormant ou veillant, moi je rêve toujours. Je dors. Mon esprit veille et poursuit son vol infat. Tantôt il va fouler d’un pied fantastique l’herbe et les fleurs... tantôt il gravit la montagne, ou il traverse une forêt sombre et frémit de terreur en en mesurant la longue obscurité et s’inquiète de n’apercevoir sur le sable les traces d’aucun voyageur... tout à coup, emporté par un torrent écumeux, il roule avec lui de précipice en précipice au milieu des rochers; de là il est jeté dans une mer tumultueuse, il nage, il lutte contre ses vagues... des monstres, les requins dévorants et les vastes baleines, accourent autour de lui. Pour les fuir, il agite ses bras et ses pieds avec plus de force. Au milieu de ce travail, je me réveille trempé de sueurs; et mon coeur palpite encore du long effroi de ces monstres que j’ai vus en songe. Je dors; mais mon coeur veille, il est toujours à toi. Je te tiens, je sens ton sein, ta bouche, ta joue sous mes baisers..., ta peau voluptueuse... sous ma main chatouilleuse... mais bientôt des transports ennemis de la paix du sommeil me réveillent en sursaut et je trouve ma bouche collée sur l’oreiller que je presse dans mes bras. Car mes bras, doucement abusés par le songe, pressaient l’oreiller en croyant te presser toi-même.
Je dors, mais mon coeur veille; il est toujours à toi.
Un songe aux ailes d’or te descend près de moi.
Ton coeur bat sur le mien. Sous ma main chatouilleuse
tressaille et s’arrondit ta peau voluptueuse.
Des transports ennemis de la paix du sommeil
m’agitent tout à coup en un soudain réveil;
et seul, je trouve alors que ma bouche enflammée
crut, baisant l’oreiller, baiser ta bouche aimée;
et que mes bras, en songe allant te caresser,
ne pressaient que la plume en croyant te presser.
Et dormant ou veillant, moi je rêve toujours.
André Chénier
Mercredi 17 avril
Coquelicots
Ô ! Enfant fragile
Feuilles vagabondes
Pétales errantes
Entre plis et replis
De nos rêves
De nos fantasmes
De nos égoïsmes
Ô ! Enfant
Espoirs et rêves
Espoirs et vies
Ô ! Enfant
Et si tu façonnes
Le monde à ta manière
Tu nous engendres
Tu nous crées
Nos serons ta sève
Nous serons ton argile
Et ta poterie
Ô ! Enfant
Et si tu t'enfonces
Au giron de Dieu
Pour lui souffler
Le chaud et le froid
Pour lui apprendre
A tresser
Les cheveux d'une étoile
Et à offrir
La lumière à une déesse
Et lui ôter délicatement le voile.
Zineb Laouedj
Lundi 15 avril
Aube
J'ai embrassé l'aube d'été.
Rien ne bougeait encore au front des palais. L'eau était morte. Les camps d'ombres ne quittaient pas la route
du bois. J'ai marché, réveillant les haleines vives et tièdes, et les pierreries regardèrent, et les ailes
se levèrent sans bruit.
La première entreprise fut, dans le sentier déjà empli de frais et blêmes éclats, une fleur qui me dit son nom.
Je ris au wasserfall blond qui s'échevela à travers les sapins : à la cime argentée je reconnus la déesse.
Alors je levai un à un les voiles. Dans l'allée, en agitant les bras. Par la plaine, où je l'ai dénoncée au coq.
A la grand'ville elle fuyait parmi les clochers et les dômes, et courant comme un mendiant sur les quais de marbre,
je la chassais.
En haut de la route, près d'un bois de lauriers, je l'ai entourée avec ses voiles amassés, et j'ai senti un peu
son immense corps. L'aube et l'enfant tombèrent au bas du bois.
Au réveil il était midi.
Arthur Rimbaud
Vendredi 12 avril
Un rêve
En des visions de la sombre nuit, j’ai bien rêvé de joie défunte, — mais voici qu’un rêve, tout éveillé, de joie et de lumière m’a laissé le cœur brisé.
Ah ! qu’est-ce qui n’est pas un rêve le jour, pour celui dont les yeux portent sur les choses d’alentour un éclat retourné au passé ?
Ce rêve béni, ce rêve béni, pendant que le monde entier grondait, m’a réjoui comme un rayon cher guidant un esprit solitaire.
Oui, quoique cette lumière, dans l’orage et la nuit, tremblât comme de loin ; que pouvait-il y avoir, brillant avec plus de pureté, sous l’astre du jour de Vérité !
Les poèmes d’Edgar Poe, traduits par Stéphane Mallarmé
A dream
In visions of the dark night
I have dreamed of joy departed—
But a waking dream of life and light
Hath left me broken-hearted.
Ah! what is not a dream by day
To him whose eyes are cast
On things around him with a ray
Turned back upon the past?
That holy dream—that holy dream,
While all the world were chiding,
Hath cheered me as a lovely beam
A lonely spirit guiding.
What though that light, thro' storm and night,
So trembled from afar—
What could there be more purely bright
In Truth's day-star?
Jeudi 11 avril
Imaginons
Le temps que met l’eau à couler de ta main
Le temps que met le coq à crier le soleil
Le temps que l’araignée dévore un peu la mouche
Le temps que la rafale arrache quelques tentes
Le temps de ramener près de moi tes genoux
Le temps pour nos regards de se dire d’amour
Imaginons ce qu’on fera
de tout ce temps.
Eugène Guillevic
Mercredi 10 avril
Rêvé pour l'hiver -
L'hiver, nous irons dans un petit wagon rose
Avec des coussins bleus.
Nous serons bien. Un nid de baisers fous repose
Dans chaque coin moelleux.
Tu fermeras l'oeil, pour ne point voir, par la glace,
Grimacer les ombres des soirs,
Ces monstruosités hargneuses, populace
De démons noirs et de loups noirs.
Puis tu te sentiras la joue égratignée...
Un petit baiser, comme une folle araignée,
Te courra par le cou...
Et tu me diras : "Cherche !", en inclinant la tête,
- Et nous prendrons du temps à trouver cette bête
- Qui voyage beaucoup...
Arthur Rimbaud
Un songe aux ailes d’or te descend près de moi.
Ton coeur bat sur le mien. Sous ma main chatouilleuse
tressaille et s’arrondit ta peau voluptueuse.
Des transports ennemis de la paix du sommeil
m’agitent tout à coup en un soudain réveil;
et seul, je trouve alors que ma bouche enflammée
crut, baisant l’oreiller, baiser ta bouche aimée;
et que mes bras, en songe allant te caresser,
ne pressaient que la plume en croyant te presser.
Et dormant ou veillant, moi je rêve toujours.
Eugène Guillevic
L'hiver, nous irons dans un petit wagon rose
Avec des coussins bleus.
Nous serons bien. Un nid de baisers fous repose
Dans chaque coin moelleux.
Tu fermeras l'oeil, pour ne point voir, par la glace,
Grimacer les ombres des soirs,
Ces monstruosités hargneuses, populace
De démons noirs et de loups noirs.
Puis tu te sentiras la joue égratignée...
Un petit baiser, comme une folle araignée,
Te courra par le cou...
Et tu me diras : "Cherche !", en inclinant la tête,
- Et nous prendrons du temps à trouver cette bête
- Qui voyage beaucoup...
9 avril
Mon rêve familier
Je fais souvent ce rêve étrange et pénétrant
D'une femme inconnue, et que j'aime, et qui m'aime
Et qui n'est, chaque fois, ni tout à fait la même
Ni tout à fait une autre, et m'aime et me comprend.
Car elle me comprend, et mon coeur, transparent
Pour elle seule, hélas ! cesse d'être un problème
Pour elle seule, et les moiteurs de mon front blême,
Elle seule les sait rafraîchir, en pleurant.
Est-elle brune, blonde ou rousse ? - Je l'ignore.
Son nom ? Je me souviens qu'il est doux et sonore
Comme ceux des aimés que la Vie exila.
Son regard est pareil au regard des statues,
Et, pour sa voix, lointaine, et calme, et grave, elle a
L'inflexion des voix chères qui se sont tues.
Paul Verlaine
L'étendoir des songes
Comme on étend le linge
qui sèche au vent et au soleil
on suspend des poèmes
qui parlent de rêve, de rêve, de rêve
Ils ont été écrits
par vous, par d'autres,
en classe, ensemble,
ou chacun dans un coin
S'il reste un peu de place
sur ces lignes de rêves
vous pourrez accrocher
vous aussi
vos songes et vos poèmes
...
EL ESTENDEDERO DE LOS SUEÑOS
Como se tiende la ropa
Que seca al sol y al viento
Colgamos poemas
Que hablan de sueños, de sueños, de sueños
Son escritos
Por vosotros, para otros
En clase, juntos
O cada uno en su rincón
Si queda un lugarcito
Entre esas líneas de sueños
Podréis colgar
Vosotros también
Vuestros sueños y poemas
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- Quinzaine des Arts 2013